samedi 14 septembre 2013

leonora et remedios




Parfois ça ne vient pas, ni feu ni lumière, ne restent que les vieilles ombres… Lire alors, s’identifier à ces deux amies, femmes peintres, libres, belles, de feu et de lumière, ce qui n’empêche pas tourment et tourmente. Ces femmes ont vécu au Mexique – décidément, je ne parviens plus à le quitter ce pays – il faudra un jour ne pas se contenter de l’ivresse livresque - s’appellent Leonora Carrington et Remedios Varo. Je reste inconsolable : Remedios vient de mourir aujourd’hui (quant à Leonora ce jour-là j’imagine aisément…)

-       Je suis hantée par un monologue que je n’arrive pas à interrompre et qui me tue à petit feu – dit-elle à Remedios. Il ne s’arrête jamais, se répète, se répète sans cesse, et j’ai beau faire, il continue à tourner dans ma tête. Je le transporte partout dès que le jour se lève.
-       Sors prendre l’air – conseille Remedios.
-       Je ne supporte plus Chiki et je ne me supporte plus moi-même. Je me disperse, mon corps est éclaté, je ne sais pas comment rassembler les morceaux.
[…]
-       Je sens que cette anxiété ne va jamais disparaître car elle fait partie de moi. Chaque matin j’ouvre les yeux au bord du précipice, persuadée que la chute sera épouvantable.
Leonora et Remedios partagent leurs états d’âme.
-       J’adore ton Angoisse. Pourquoi l’as-tu signée Uranga ?
-       Parce qu’elle était destinée à la maison Bayer – répond Remedios.
-       J’ai l’impression que tu as fait mon portrait.
-       Non, Leonora, ne dis pas cela, toi tu n’es pas ligotée. En plus, tu es supérieurement intelligente.

Elena Poniatowska, Leonora, éd. Actes Sud, 2012, p. 346.



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